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L'information préventive réglementaire

Jardin public inondé

Créé le 03/02/2022   

Les outils de communication réglementaires sur les inondations en France

Pour compléter le dispositif juridique et structurel de la gestion des risques inondations, une communication préventive réglementaire a été mise en place de manière simultanée ; les pouvoirs publics estimant que la prévention des inondations concerne directement les habitants et qu’ils doivent être sensibilisés pour être acteurs de leur sécurité.

Par Rachel VINDRY (Sociologue et Fondatrice de Autrement Dit)

Ainsi très tôt dans les dispositifs, une communication réglementaire a été mise en place pour développer ce qu’on appelle communément ‘‘la culture du risque’’. L’information préventive a notamment été initiée par la loi du 22 juillet 1987 en instituant un droit à l’information pour le citoyen et des obligations pour les préfets et les maires. Elle a été reprise par la loi du 30 juillet 2003 (dite Loi Bachelot).

Les principaux outils de communication réglementaires sont listés ci-après. Ils engagent la responsabilité du Préfet (département et région), du Maire (niveau communal) et du Propriétaire d’un bien (information Acquéreur Locataire) ou de tout citoyen concerné par les inondations.

Le Dossier Départemental des Risques Majeurs (DDRM)

Le DDRM se veut pédagogique en mettant à disposition des habitants d’un département l’ensemble des aléas naturels et technologiques auxquels ils peuvent être exposés. Il s’agit donc d’informer et de responsabiliser à la prévention des risques majeurs. Le document donne des notions de base sur les risques majeurs, précise les enjeux départementaux, régionaux voire nationaux. Il doit aussi mentionner les consignes à respecter en cas de crise liée à une catastrophe naturelle ou à un accident industriel.

Le DDRM est transmis par le Préfet de département aux maires en diffusant des cartes communales et en indiquant pour chaque risque présent sur la commune :

• les zones concernées ;

• le type d’aléa précis ;

• les caractéristiques et les dégâts engendrés ;

• l’état de catastrophe naturelle ;

• les actions préventives dans la commune (connaissance du risque, surveillance, mitigation, dispositions d’aménagement et d’urbanisme.

Le Dossier d’Information Communal sur les Risques Majeurs [DICRIM]

Le DICRIM est obligatoire pour toutes les communes répertoriées à risque dans le dossier départemental des risques majeurs (DDRM). Il décline à l’échelle communale les informations disponibles dans le DDRM. Le maire récupère en effet les informations auprès de la Préfecture sur les risques présents sur sa commune et susceptibles de provoquer un danger imminent. Il doit aussi préciser dans ce document les consignes en cas de crise et donner les directives en matière de mise en sécurité des personnes et des biens. Une campagne de communication doit être planifiée dans le cadre de la diffusion du DICRIM. La commune a l’obligation d’affichage des consignes.

Le Plan Communal de Sauvegarde (PCS)

Le Plan Communal de Sauvegarde est soumis au code de la Sécurité intérieure. Il a pour finalité première de formaliser l’organisation d’une commune en cas de situations d’urgence. Il s’avère obligatoire pour toutes les communes disposant d’au moins un Plan de Prévention des Risques (PPR) ou un Plan Particulier d’Intervention (PPI) approuvés.

Le PCS n’est pas un support de communication directe pour les populations. Il constitue un outil d’aide à la décision des pouvoirs publics en cas de crise (inondation ou autres événements naturels ou risques technologiques). Des exercices doivent être mis en œuvre pour tester l’efficacité du PCS en impliquant au maximum les populations concernées.

Le Plan de prévention des risques inondation (PPRi)

Le PPRi est un dossier réglementaire de prévention pour faire connaître les zones à risques aux populations et aux aménageurs. Il définit également les mesures de réduction de la vulnérabilité. Il s’intègre aux documents réglementant l’occupation des sols (PLU, SCoT). Il est approuvé après une phase d’enquête publique durant laquelle tout un chacun peut être consulté.

Le PPR constitue une servitude d’utilité publique et s’impose à tous dans le cadre d’une demande de permis de construire.

Les repères de crues

Pour sensibiliser les citoyens au risque inondation et à la mémoire du risque, la pose de repères de crues apparaît comme une réponse adaptée. La loi du 30 juillet 2003 impose aux maires de poser sur leur commune des repères de crues correspondant aux crues historiques et aux nouvelles crues exceptionnelles. Les repères de crues sont normalisés. Ils sont nivelés et géolocalisés. Leurs emplacements doivent être stratégiques et les propriétaires des lieux concernés doivent être mis au courant.

L’Information Acquéreur Locataire pour le citoyen

Dans le cadre du dispositif ‘‘Information Acquéreur Locataire’’ dit IAL, le citoyen peut accéder aux informations via les sites internet des préfectures, via la rubrique «Mieux connaître les risques près de chez soi» sur le site internet de Géorisques ou en région Sud sur la rubrique ‘‘Moi Citoyen’’ de l’ORRM PACA.

                   

Bilan de la communication préventive réglementaire sur les inondations

Malgré cet ‘‘arsenal’’ d’outils de communication réglementaire, les retours d’expérience montrent que la culture du risque a du mal à s’ancrer et que cette communication cadrée et imposée ne permet pas de modifier des comportements encore trop souvent inadaptés face aux inondations. Plusieurs raisons peuvent expliquer la ‘‘faible efficacité’’ de ces dispositif de communication :

  • leur manque de notoriété auprès des populations : même s’ils sont censés être accessibles et malgré certains efforts de vulgarisation, ces outils sont dans la majorité des cas peu connus et souvent compliqués à comprendre pour des non initiés ;
  • les outils réglementaires se sont établis autour d’une communication descendante dont l’information est généralement livrée brute ;
  • les habitants s’informent par d’autres canaux que les dispositifs réglementaires voire ne vont pas spontanément chercher l’information sur un sujet qui, lorsque l’événement s’éloigne de quotidien, ne les intéressent pas ou plus ;
  • malgré cette communication, la connaissance du risque reste partielle et ne permet pas de représenter l’inondation en termes de hauteur d’eau, de dégradation matérielle, ni d’appréhender réellement le danger humain, les notions de délai de retour à la normale ;
  • l’exercice de mémoire-projection que sous-tendent les repères de crues n’est pas non plus intuitif. Les repères de crues, bien que physiquement présents pour rappeler un épisode d’inondation, se fondent rapidement dans le paysage et sont parfois vite oubliés s’ils ne sont pas accompagnés d’explications ;
  • les documents de communication réglementaires sont dans la majorité des cas ‘‘dépersonnalisés’’, ce qui tend à désintéresser les populations ;
  • le risque y est encore trop véhiculé comme négatif, et notamment comme une contrainte.

La communication réglementaire même si elle reste essentielle montre ainsi ses limites : elle s’inscrit davantage dans un objectif informationnel que dans une perspective comportementale, pensant pourtant avec de l’information pourvoir faire changer les pratiques. La communication descendante qu’on cherche à rendre persuasive ne fonctionne pas comme on le pense : au lieu de modifier les pratiques, elle peut au contraire renforcer les idées reçues et être ainsi contre productive en termes d’évolution des comportements individuels face aux inondations.


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