Vélos sûrs en ville : quand la signalisation innove et réfléchit

Les tests sur simulateur, menés au laboratoire PICS-L de l’Université Gustave Eiffel, montrent que cette signalisation repensée contribue à des comportements moins risqués de la part des cyclistes mais aussi des automobilistes. Non seulement ils respectent davantage le code de la route (moins de feu grillés), mais ils roulent moins vite.

On remercie rarement. Et pourtant ça marche.

Anticipation comportementale avant l’intersection et gratitude après : les nouveaux symboles, qu’ils apparaissent au sol ou sur des panneaux (signalisation horizontale et verticale), activent un ressort psychologique différent. Il s’agit d’influencer la conduite par la suggestion et non l’interdiction ou l’injonction.

C’est le principe du « nudge », visuel qui a pour but de faire évoluer les comportements. Une représentation de collision voiture-vélo prépare les cyclistes avant le croisement, un pouce levé les félicite une fois le carrefour franchi ; et ça change manifestement la donne. Il est si rare de dire merci, dans le trafic comme ailleurs, que ce levier – combiné à une signalisation horizontale claire – peut être durablement marquant. C’est en tout cas ce que montrent les tests, pratiqués parallèlement avec la nouvelle signalisation et une signalétique classique.

Des yeux de chat dans la nuit

L’efficacité de la signalisation tient aussi à l’utilisation de matériaux hautement rétroréfléchissants, signés 3M. La formule : des billes en céramique à fort indice de réfraction intégrées dans le marquage et des milliers de micro-prismes au cm² dans le revêtement des panneaux. Le résultat : une signalisation lumineuse la nuit sous l’effet des phares des véhicules.

En outre, deux plots routiers lumineux de nuit (Cat’s Eyes) figurent l’entrée de la piste cyclable, tels une porte virtuelle. Quand le cycliste serait tenté, lors d’un virage à droite ou à gauche, de couper au plus court, le marquage rétroréfléchissant, à la fois suggestif et plus visible, l’incite à rester dans le couloir vélo.

*Réseau animé par des chercheurs de la Montpellier Business School

L’effet de cette signalisation, visible aussi bien la nuit que le jour, est double : conduire les vélos à emprunter les couloirs qui leur sont dédiés. Et ancrer leur présence dans le champ de conscience des automobilistes. Le dispositif attise la vigilance de tous. Un cercle vertueux, donc, qui devrait amener tous les usagers de la route à adopter un comportement plus prudent en ville.

Un simulateur bluffant

La gageure consistait à simuler la circulation dans une agglomération, de nuit, de manière la plus proche possible des conditions réelles. Pourquoi la nuit ? Parce qu’elle réunit les conditions les plus propices aux accidents. Le plus délicat, pour l’équipe de l’Université Gustave Eiffel, a été de représenter avec réalisme l’effet rétroréflechissant de la signalisation. Le résultat est bluffant.

Un vrai vélo et un habitacle de voiture sont placés devant un écran panoramique figurant la route, de nuit, dans une ville. Tout y est : autres usagers, feux tricolores, végétation, carrefours... Chaque participant passe successivement du vélo au volant et se prête à l’exercice avec une consigne : ne pas hésiter à prendre des risques pour effectuer le parcours le plus rapidement possible.

Et il n’y a pas photo : le groupe test, qui bénéficie de la nouvelle signalétique, est plus prudent et respectueux des règles que le groupe contrôle (même parcours avec une signalisation classique).

Faire bouger les lignes et les mentalités

Un marquage au sol souvent à demi effacé, des petits panonceaux cyclistes souvent peu perceptibles par les usagers, et surtout l’habitude… On ne fait plus vraiment attention au code de la route destiné aux vélos. L’idée est donc de le rendre plus présent au regard et à l’esprit de tous, en misant à la fois sur la psychologie et la technologie.

La prochaine étape pourrait être de présenter cette signalisation innovante à des élus et de la faire tester en situation réelle. On lui souhaite de faire un carton, et d’en éviter de nombreux.